Les jeunes générations d’aujourd’hui seront confrontées aux grandes mutations que va connaître ce siècle. En effet, l’automisation et l’arrivée incessante de nouvelles technologies risquent de rendre obsolètes environ un milliard d’emplois (sur les deux milliards existants),requérant des qualifications moyennes ou faibles, pour faire apparaître de nouveaux métiers demandant en revanche un haut niveau de compétences.
Un constat de plus en plus alarmant
En rajout à ce constat, la part de l’éducation dans les budgets publics de nombreux pays a diminué en dépit de besoins constants tandis que l’aide internationale à l’éducation a baissé de 10% au cours des dernières années, créant un véritable déficit mondial de financement pour l’éducation de base.
Insidieusement, une crise mondiale en matière d’éducation et d’enseignement s’est propagée, renforcée par d’autres facteurs: la pauvreté, l’inégalité, l’instabilité, le chômage…
Si aucune mesure globale et durable n’est prise pour stopper cette crise, d’ici 2030 plus de 800 millions de jeunes la moitié des enfants et jeunes dans ce monde ne seront pas en mesure d’acquérir les connaissances de base et 1,5 milliard d’adultes n’auront pas dépassé le stade de l’éducation primaire. En 2050, le nombre de vies perdues à cause d’un déficit de niveau scolaire égalerait celui des pertes actuelles dues au virus du VIH/Sida et de la malaria si les gouvernements ne réagissent pas.
Au XXIème siècle, les économies nationales et les sociétés se développeront ou s’étioleront,plus à cause de leurs ressources intellectuelles que de leurs ressources physiques.
Learning Generation, un rapport établi par la Commission pour l’Education
Pour trouver les remèdes qui éradiqueraient à tout jamais cette crise, la Commission Internationale pour l’Education, a présenté en septembre 2016 à l’Assemble Générale des Nations Unies son rapport de financement de l’éducation, Learning Generation – élaboré après une année de recherches qui impliquaient plus de 300 partenaires représentant 105 pays et 30 instituts de recherche – qui présente la plus ambitieuse stratégie de l’histoire moderne pour augmenter et perfectionner l’offre éducative en quatre étapes. En septembre dernier (2017), la Commission a présenté les premiers succès d’exécution dans 20 pays pionniers d’Afrique et d’Asie.
La Commission Internationale pour l’Education – mise en place pour identifier les moyens susceptibles de renforcer les investissements financiers en matière d’éducation – fut créée en 2015 avec le soutien et l’approbation de Ban KI-MOON, Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies. Elle est animée par le Premier Ministre de la Norvège, les Présidents du Malawi, de l’Indonésie et du Chili et par la Directrice de l’UNESCO.
Présidée par l’ancien Premier Ministre de la Grande-Bretagne et Envoyé Spécial des nations unies pour l’Education, Gordon BROWN, la Commission compte parmi ses membres des anciens chefs d’État (Mexique, Tanzanie, Australie), des prix Nobel et des leaders du monde de l’éducation, de l’économie et des affaires, du développement, de la santé et de la sécurité.
En Décembre 2015, Amel KARBOUL, ex Ministre du Tourisme en Tunisie et Secrétaire Générale du Maghreb Economic Forum (MEF) à Genève et Tunis, rejoignait la Commission. Il convient de noter que la Tunisie fait figure de bon élève et de précurseur dans le MENA du fait de l’importance accordée à l’éducation dès les premières heures de son indépendance.
Les quatre étapes pour faire de la génération d’apprenants, une réalité
Lors de son rendu de rapport Learning Generation qui propose un vaste choix de solutions d’éducation, tout en donnant un aperçu des réformes et en prônant une augmentation des investissements financiers, la Commission a souligné que sa vision d’une éducation performante qui permettrait à tout enfant de réunir les compétences nécessaires pour réussir dans sa vie et son travail, pouvait être réalisée au sein d’une seule génération si tous les pays adoptent les meilleures pratiques qui existent en matière d’éducation.
Quatre étapes pour atteindre ces objectifs :
1. Performance : il convient de renforcer la performance des systèmes éducatifs nationaux en mettant l’accent sur les résultats d’apprentissage et en s’inspirant des meilleurs systèmes qui ont fait leur preuve ailleurs.
2. Innovation : la création d’un environnement propice à l’innovation doit émerger dans trois secteurs prioritaires essentiels à la réussite : le personnel éducatif, la technologie et le rôle des partenaires extérieurs à l’État.
3. Inclusion : combattre la multitude de facteurs qui détermine si un enfant va ou non à l’école, y reste ou non, y apprend ou non, en appliquant un concept d’universalisme progressif, offrant des services d’éducation de qualité et la priorité aux personnes démunies et défavorisées.
4. Financement : les dépenses en éducation doivent passer de 1,2 millier de milliards à 3 milliers de milliards d’ici 2030 dans les pays à faibles et moyens revenus. Un Engagement de Dons pour l’Education est recommandé par la Commission pour permettre à des particuliers, dotés de fonds propres, de soutenir l’effort international.
Pioneer Country Initiative, pour passer à l’action
Lancée en novembre 2016, l’initiative Pioneer Country aide les pays à passer à l’action et à appliquer les recommandations émises par la Commission. Pour ce faire, la Commission représentée par Jakya KIKWETE, ancien Président de la Tanzanie, a mené de nombreuses visites de délégation de haut niveau en Afrique pour rencontrer les chefs d’État et mener des réunions avec des représentants du secteur public et privé.
Quatorze pays africains à faibles et moyens revenus, dont la Tunisie, ont été sélectionnés pour la phase initiale de visites. L’Asie, l’Amérique Latine et les Caraïbes sont également visés dans cette démarche que la Commission veut mondiale.
En Tunisie, la première visite de la Commission, menée par Jakya KIKWETE et par Amel KARBOUL avait eu lieu fin février 2017. Reçus par le Président de la République, Beji CAID ESSEBSI qui avait promis son plein soutien, les membres de la Commission avaient également rencontré Neji JALLOUL, alors Ministre de l’Education, très motivé par l’Initiative et qui avait su transmettre son intérêt à son successeur intérimaire, Slim KHALBOUS et au nouveau Ministre de l’Education, Hatem BEN SALEM.
Une seconde visite aura lieu mi-novembre prochain pour mettre en place le laboratoire qui analysera la situation actuelle de la Tunisie et ses problèmes en matière d’éducation. Une proposition de solutions et d’idées suivra l’audit avec un plan stratégique de mise en œuvre.Les laboratoires représentent un travail de profondeur rigoureux et intense, mettant en scène entre 50 et 100 participants durant six semaines consécutives.
« Cette seconde visite de la Commission Internationale de l’Education revêt une importance toute particulière. En qualité de Tunisienne, fière d’appartenir à cette Commission qui regroupe en son sein des sommités internationales de renom, animées par la même passion d’offrir à tous les enfants de la terre une éducation qui leur donnera une vie de joies et de réussite, j’espère que la Tunisie, déjà remarquée il y a plus de soixante années par sa position pionnière en matière d’éducation, restera toujours un exemple en Afrique. » déclarait Amel KARBOUL, Membre de la Commission Internationale pour l’Education.