Mohsen Boujbel : «Dynamiser la Coopération Tuniso-Espagnole.»

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Mohsen-Boujbel

Interview avec Mohsen Boujbel, Président de la Chambre Tuniso-Espagnole de Commerce et d’Industrie (CTECI).

Monsieur le Président, votre témoignage sur le partenariat tuniso-espagnol et les principaux domaines de coopération, sachant que nous avons constaté une nette reprise des relations ces dernières années ?

La reprise des relations entre la Tunisie et l’Espagne est due principalement à deux raisons, la première c’est que la crise économique qui a secoué l’Espagne en 2008 a constitué une prise de conscience pour son gouvernement pour placer le volet des exportations comme étant la priorité absolue du pays et l’unique voie pour sortir de la crise. Cette nouvelle politique s’est traduite par une présence plus importante sur le marché tunisien à travers l’implantation de nombreux groupes espagnols et une croissance soutenue d’échanges commerciaux entre les opérateurs des deux pays.

Il est à noter qu’aujourd’hui plus de 4000 opérateurs espagnols réalisent des opérations commerciales avec leurs homologues tunisiens. Ce raffermissement des échanges entre les deux pays, a été accompagné par l’octroi d’une ligne de crédit espagnole de 25 millions d’euros qui a été mise à disposition des opérateurs tunisiens pour soutenir les PME-PMI.

Dans ce cadre, nous voudrions véhiculer un message fort auprès des opérateurs et hommes d’affaires tunisiens, c’est que nous avons beaucoup d’opportunités à développer avec la partie espagnole. Eu égard, à la ressemblance du business entre les deux pays, nous avons donné la priorité dès le départ à quatre secteurs qui constituent les piliers de la coopération à savoir l’agroalimentaire, les énergies renouvelables, les technologies d’information et de communication et la santé.

Parallèlement, nous avons transmis aux différents acteurs économiques tunisiens le processus de l’intégration de l’Espagne à l’Union Européenne, afin de les faire bénéficier de cette expérience, qui l’a conduit à une transformation profonde en matière de politique économique et industrielle. Nous voudrions par le biais de cette intégration creuser dans la démarche adoptée par l’Espagne pour étudier l’impact de l’adhésion éventuelle de la Tunisie à l’Accord de Libre-échange Complet et Approfondi (ALECA) proposé par l’UE sur le tissu économique et industriel de la Tunisie. Compte-tenues des divergences constatées de part et d’autre depuis le lancement de la proposition de l’ALECA et eu égard au rôle de notre Chambre en tant qu’acteur économique qui a pour mission, entre autres, de mobiliser et sensibiliser le monde des affaires, nous voudrions profiter de la démarche espagnole ainsi que des autres cas similaires pour rapprocher les points de vues et arriver à un accord qui serait profitable à toutes les parties.

En ce sens, nous avons proposé d’inviter un économiste espagnol pour nous brosser l’expérience réussie de son pays qui a conduit à une transformation profonde de l’économie et l’intégration de tout l’écosystème espagnol dans ce processus. Par ailleurs, il est à rappeler que l’Espagne a beaucoup contribué au développement du secteur agricole et alimentaire tunisien à travers la création de plusieurs pépinières dans le cadre de joint venture tuniso-espagnols ce qui a eu un effet d’entraînement sur le transfert des technologies espagnoles dans le domaine de l’agriculture vers la Tunisie.

La Tunisie a beaucoup profité de cette avancée technologique, particulièrement, dans la branche de l’arboriculture et notamment par le biais de la plantation intensive des oliviers d’origine espagnole ainsi que l’importation de nouvelles variétés de bonne qualité et d’une grande rentabilité telles que « Arbequina» qui se sont développées en Tunisie dans le cadre de ce partenariat. Je citerai également les labels « Borges » et « La Cinquième Saison », qui sont des leaders mondiaux respectivement dans les branches de l’huile d’olive et les fruits et légumes qui se sont implantées en Tunisie dans le cadre de la coopération tuniso-espagnole.

Par ailleurs, le secteur des énergies renouvelables, éoliennes et photovoltaïques essentiellement, constitue un des piliers du partenariat tuniso-espagnol et un domaine stratégique qui possède beaucoup de perspectives afin de fonder des relations durables et prospères des deux côtés.

La Tunisie qui parie sur les énergies renouvelables pour réduire les dépenses énergétiques de 30% d’ici 2030 devrait bénéficier de l’expérience de l’Espagne en ce domaine pour l’aider à réaliser les gros investissements que nécessiteraient la mise en place de cette alternative et leurs extensions.

Je voudrai terminer en évoquant dans le domaine de TIC la promulgation de la loi relative au programme « Startup Act ». C’est le rôle de la Chambre, également, de mettre en relief et de promouvoir auprès de l’Espagne, le réservoir tunisien de startups qui représenteraient l’avenir de la Tunisie dans le domaine digital.

Vous avez un rôle de sensibilisation ?

Le rôle de la CTECI est très important afin d’aplanir les problèmes entravant le rapprochement des opérateurs tunisiens et espagnols et la création d’un réseau solide de part et d’autre. Son rôle est également d’être le porte parole des différents investisseurs et entreprises mixtes auprès des pouvoirs publiques et l’interface entre le monde des affaires tuniso-espagnol et le Gouvernement tunisien.

De ce fait, tout l’écosystème tunisien devrait collaborer ensemble pour promouvoir les relations tuniso-espagnoles afin d’atteindre le statut d’un partenariat privilégié. Je voudrai affirmer à ce sujet que les pouvoirs publics, les administrations et les premiers responsables étaient toujours à l’écoute des problèmes liés aux entreprises tuniso-espagnoles et très sensibles à nos différentes recommandations formulées en ce sens. Je saisis cette occasion pour remercier le Gouvernement tunisien pour sa bonne collaboration ainsi que pour sa confiance placée à notre Chambre et sa gratitude envers le rôle que nous jouons pour dynamiser la coopération tuniso-espagnole.

Votre message ?

J’appelle les différents opérateurs et les entreprises tunisiennes à profiter de la ligne de crédits espagnole de 25 millions d’euros avant la date butoir de 2022. Notre Chambre est entièrement à leurs dispositions pour les appuyer afin de développer et étendre leurs affaires en Espagne. Par ailleurs, je voudrai noter que l’économie du savoir représente l’économie de l’avenir.

A cet effet, il faudrait que la Tunisie adopte une politique académique et éducationnelle plus ouverte et un enseignement tourné plus vers l’avenir afin de préparer les jeunes à pouvoir s’intégrer dans le monde de 2050. Eu égard aux ressources limitées de notre pays, notre seule richesse et l’unique voie de salut résident dans l’investissement dans l’intelligence humaine.


Par : Jamel GOUBANTINI

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