Lotfi Darragi : «95% de nos étudiants ont trouvé du travail parce qu’ils sont immédiatement opérationnels.»

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Lotfi Darragi CEO ReBootkamp Tunisie

Interview avec Lotfi Darragi, CEO – ReBootkamp Tunisie (RBK)

En juin 2019 vous lancez la filiale Tunisienne de l’américain ReBootkamp peut-t-on dresser un premier bilan ?

En fait, il convient de parler d’abord comment l’idée m’est venue de lancer le concept ReBootkamp en Tunisie. L’idée a germé dans ma tête après une rencontre avec des centaines de jeunes tunisiens dans le centre du pays. Là, j’ai eu l’occasion de voir des gens découragés, démobilisés mais en même temps démunis des moyens de décrocher un poste d’emploi dans la mesure où leur formation est soit purement académique et ne leur offre pas beaucoup de perspectives, soit inadaptée au marché du travail et à ses besoins. J’ai donc ressenti une terrible frustration à voir ces jeunes vivre une telle situation et dans de telles conditions.

Or, et comme je m’intéressais depuis des années aux ressources humaines et à leur évolution, ainsi qu’à leur meilleur usage, je voulais avoir une contribution encore plus concrète et trouver les moyens de venir en aide à ces jeunes afin d’intégrer le marché du travail. Car et si chacun de nous fait l’effort nécessaire, chacun dans son domaine, on parviendra certainement à améliorer les choses, et surtout à donner de l’espoir aux jeunes.

C’est à partir de cette conviction que j’ai décidé de lancer le concept ReBootkamp en Tunisie : un défi pas simple à relever vu qu’il s’agit d’un concept de formation innovateur dans tous les sens du terme.

Il s’agissait de convaincre l’environnement socio-économique d’un nouveau concept « d’éducation » et de formation, différent du modèle existant. Et à ce propos, je pense que nous sommes en train de réussir dans notre démarche à partir du moment où nous sommes devenus très sollicités et très recherchés.

Pour dresser un premier bilan, je dirais qu’il est, en soi, très positif. Mais, nous espérons encore le développer davantage pour répondre aux demandes des jeunes et des entreprises. Jusqu’ici nous avons organisé six sessions et une trentaine d’étudiants ont achevé leur cursus. Ce qui est pour moi décisif dans tout cela, c’est le taux élevé d’employabilité qui a atteint 95%. C’est cela notre objectif, former des jeunes que l’on embauche en un temps record.

ReBootkamp Tunisie mise sur la formation annuelle de 1000 développeurs où en êtes-vous par rapport à ce challenge ? 

Nous avons débuté notre expérience par un petit nombre d’étudiants que nous augmentons graduellement au fur et à mesure de notre développement. Cependant, je dois dire que nous avons certes la volonté de former un millier de jeunes annuellement, mais nous ne le ferons pas au détriment de la qualité de la formation. C’est dans cet esprit que nous avons mis au point des critères de sélection très sévères de manière à ne prendre que les jeunes les plus motivés, question aussi d’assurer et de garantir leur réussite. Car le candidat à cette formation ReBootkamp doit non seulement avoir de bonnes prédispositions mais aussi avoir une forte envie de réussir, d’aller jusqu’au bout et de faire preuve de créativité et d’initiative. C’est ce profil de jeunes que nous formons.

Je vous donne un chiffre révélateur du niveau d’exigence. Ainsi et pendant les six sessions organisés jusque-là, nous avons retenue et sélectionnés seulement 150 candidats parmi les 850 qui se sont présentés. Maintenant, que tout est en place, que l’équipe de formation est très bien rodée et que nous avons consenti des efforts pour étendre nos locaux, nous espérons pouvoir atteindre ce chiffre de 1000 développeurs chaque année voire plus. D’ailleurs, le lancement de notre prochaine session a été fixé au 17 août.

Comment coopérez-vous avec les entreprises IT qui recrutent des développeurs ? 

De par mon expérience professionnelle principalement dans le développement des ressources humaines m’a amené à avoir d’abord d’excellentes relations avec plusieurs entreprises nationales dans tous les secteurs et tous les domaines. Ensuite, ces relations m’ont permis de comprendre les besoins réels de ces entreprises en termes de ressources humaines et qui peuvent leur assurer d’être toujours au premier plan et de s’adapter à l’environnement économique notamment sur le plan international.

Notre coopération est donc essentielle. Nous avons obtenu la confiance des entreprises dans la mesure où nous leur offrons des profils de jeunes développeurs performants, créatifs et par conséquent rentables, qui peuvent leur assurer l’évolution souhaitée.

Cette confiance mutuelle a justement déjà permis à nos jeunes développeurs que nous avons formés d’obtenir un emploi et donc d’intégrer ces entreprises. Je suis certain que ces entreprises seront satisfaites de l’apport de ces jeunes qui sont passés par ReBootKamp.

Où en est la Tunisie dans le domaine de la formation aux métiers du digital ? 

Le monde entier est confronté à un problème de chômage. Mais et en même temps, le besoin des entreprises en termes de ressources humaines dans les technologies nouvelles demeure très élevée, voire même il existe un manque en ce domaine. La Tunisie n’échappe pas à ce besoin urgent en développeur. Il s’agit d’un environnement économique nouveau qui a cette caractéristique de changer rapidement.

Autrement dit, le monde du travail connait des mutations rapides qui obligent les entreprises à s’adapter et donc à adopter de nouvelles méthodes de travail. Dans notre pays, la formation à ces métiers demeure encore au stade embryonnaire, dirais-je ! Car, il faut comprendre que le système éducatif tunisien est défaillant dans ce domaine dans la mesure où il n’a pas vraiment changé. La lenteur du système éducatif et donc son inadaptation aux changements rapides du monde du travail vont obliger la Tunisie à se mobiliser pour la formation de centaines de jeunes aux métiers du Digital. Un grand effort doit être réalisé sur ce plan et dans ce domaine, et l’Etat devrait investir pour assurer cette formation.

Il me semble que les diplômés de l’enseignement supérieur par exemple qui n’arrivent pas à trouver un emploi, dans la mesure où leur formation académique n’est pas (plus !) adaptée au marché du travail, devraient être encouragés à suivre ce genre de formation qui se fait dans des délais réduits.

De quelle manière ReBootkamp Tunisie peut enrichir l’émergence d’un écosystème IT ? 

Nous ne prétendons pas résoudre tous les problèmes de l’emploi dans notre pays ou à répondre à tous les véritables besoins de nos entreprises. Nous espérons seulement contribuer, de par notre initiative, à encourager d’abord les entreprises à se moderniser et donc à adopter les nouvelles méthodes de travail sachant l’apport décisif aujourd’hui des nouvelles technologies. Nous allons former des jeunes qui sont immédiatement opérationnels après quelques semaines de formation intensive.

Cette expérience, qui a vu le jour aux Etats-Unis, permet de dépasser le gouffre entre les besoins des entreprises et la formation académique. Ainsi, l’objectif consistait à donner aux jeunes deux types de compétences : des compétences générales (Soft-skills) et des compétences techniques (Technical-Skills). C’est ce que ReBootKamp Tunisie essaie de faire.

Autrement dit, nous offrons aux entreprises des jeunes formés, capables de donner le plus grâce non seulement à leurs capacités techniques mais aussi à leurs capacités créatives et humaines. Nous espérons que ReBootKamp puisse contribuer à enrichir, grâce à son expérience, et à permettre une émergence d’un véritable écosystème IT.

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