
Entre inflation persistante, tensions géopolitiques et bouleversements des modèles économiques, les entreprises tunisiennes font face à une ère de « permacrise ». Dans ce contexte, les Directions Financières (DF) se positionnent comme des piliers stratégiques, naviguant entre défis et opportunités pour assurer la survie et la croissance des organisations.
C’est ce que révèle la première édition du rapport de PwC Tunisie, basé sur une étude menée auprès de 290 directeurs financiers. Intitulée « Priorités 2025 des Directions Financières – Relever les défis », cette enquête met en lumière les trois axes majeurs de transformation : le renforcement du pilotage de la performance, l’accélération de la digitalisation et la mise en place d’une gestion proactive des risques.
Le nerf de la guerre : La gestion du cash
Dans un contexte où l’accès au financement devient plus difficile et coûteux, la gestion de la trésorerie s’impose comme une priorité absolue. 51 % des directeurs financiers interrogés déclarent vouloir mettre en place des dispositifs agiles intégrant l’évaluation des risques, tandis que 45 % estiment crucial d’améliorer leur modèle de pilotage de la performance pour gagner en agilité face aux incertitudes.
La digitalisation apparaît comme un levier essentiel pour optimiser les flux financiers. 66 % des DF affirment avoir déjà entamé ou prévoient d’investir dans des programmes de transformation digitale, notamment via l’automatisation des processus de reporting et l’adoption d’outils avancés d’analyse de données.
Vers une finance augmentée : digitalisation et innovation technologique
La transformation digitale n’est plus une option. Si la moitié des DF considèrent la digitalisation comme une priorité immédiate, 40 % ont déjà lancé des initiatives intégrant des technologies comme l’intelligence artificielle (IA), la robotisation des processus (RPA) et l’analyse avancée des données (Data Analytics).
Toutefois, le coût et la résistance au changement restent des freins majeurs. 36 % des répondants pointent du doigt le coût élevé des solutions digitales, tandis que 31 % évoquent une réticence interne à abandonner les méthodes traditionnelles. Pourtant, les bénéfices sont indéniables : réduction des coûts opérationnels, optimisation de la prise de décision et meilleure anticipation des risques.
Selon PwC, les entreprises tunisiennes les plus avancées dans la digitalisation de la fonction finance pourraient devenir des références locales en matière d’innovation, inspirant les autres à suivre leur exemple.
La montée en puissance du « Business Partner » financier
Autre tendance forte : l’évolution du rôle du directeur financier. Longtemps perçu comme un simple gardien des comptes, il devient un véritable « Business Partner », impliqué dans la stratégie globale de l’entreprise. Aujourd’hui, la DF ne se contente plus de gérer la conformité réglementaire et fiscale. Elle intervient activement dans la gestion des talents, la transformation des modèles économiques et la prise de décision stratégique.
67 % des directeurs financiers souhaitent mettre en place un outil IT dédié à la comptabilité analytique, tandis que 52 % travaillent déjà sur l’intégration des critères ESG dans leurs reportings financiers.
La gestion des risques au cœur des préoccupations
Les incertitudes économiques et géopolitiques rendent impératif le développement d’une approche proactive des risques. Le top 3 des risques identifiés par les DF pour les 12 prochains mois inclut la cybersécurité, le risque de liquidité et les risques financiers.
Pour se prémunir, les DF misent sur la mise en place de dispositifs de surveillance en temps réel et sur des stress-tests financiers. Pourtant, 76 % des entreprises industrielles et de services et 71 % des institutions financières ne disposent pas encore d’une cartographie complète des risques. Un retard qui pourrait s’avérer coûteux face aux crises à venir.
Une confiance mesurée, mais en hausse
Malgré les défis, les directeurs financiers affichent un optimisme prudent. 78 % d’entre eux se déclarent confiants quant aux perspectives de croissance de leurs entreprises à un horizon de 12 mois, un chiffre qui grimpe à 80 % pour les trois prochaines années.
Cette résilience s’explique par la capacité des entreprises tunisiennes à s’adapter rapidement et à restructurer leurs modèles opérationnels. Mais elle dépendra largement de la rapidité avec laquelle elles adopteront les nouvelles technologies et renforceront leur gestion des risques.