LE LAB’ESS, UN INCUBATEUR À IMPACT : Une offre diversifiée qui ne fait que grandir

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L’expérience au service du changement

Créé en 2012, à Tunis, un an après la révolution, le Laboratoire de l’Economie Sociale et Solidaire (Lab’ess) est une association tunisienne, fondée avec l’ambition d’accompagner les acteur.rice.s du changement, en leur permettant de se structurer et de se développer et ainsi de contribuer à la mise en place d’un modèle social et économique plus solidaire, inclusif et durable. Lors de sa fondation, le Lab’ess s’est attaché à soutenir les organisations de la société civile, à travers son programme d’accompagnement des associations tunisiennes nouvellement crées. Fort de son expérience auprès des porteur.euse.s de projets associatifs, le Lab’ess décide alors de mettre à profit son savoir-faire pour soutenir les entrepreneur.e.s à impact. C’est ainsi qu’en 2015, le Lab’ess crée à Tunis son incubateur. Le programme d’incubation dure 6 mois, alliant mises en relation, suivi individuel et temps collectifs pour répondre au mieux aux besoins des entrepreneur.e.s sociaux.ales.

Un changement d’ampleur pour l’incubation

Avec le soutien technique et financier du projet Innov’I – EU4Innovation, mise en œuvre par Expertise France et financé par l’Union Européenne, le Lab’ess prend un nouveau tournant et étend son impact auprès des entrepreneur.e.s. Le Lab’ess a donc pu donner une nouvelle ampleur à son programme d’incubation en développant les capacités de sa propre équipe en charge de l’accompagnement, en s’appuyant sur davantage d’expertises externes, en proposant des services de meilleure qualité et en lançant un fonds d’amorçage. Depuis 2020, le projet Innov’i a permis au Lab’ess de soutenir 5 promotions d’incubé.e.s soit un total de 54 entreprises à impact par le biais de ces cohortes successives, dont 60% de femmes entrepreneures.

Financement et accompagnement : les clés de la réussite

Alors que les entrepreneur.e.s classiques rencontrent des difficultés pour trouver des sources de financement pour les étapes clés de leur projet, les entrepreneur.e.s à impact doivent en plus faire face à l’incompréhension des financeurs sur leur modèle économique et objet social de leur entreprise. Le Lab’ess a alors pu mettre en place un dispositif innovant en Tunisie, le prêt d’honneur. Grâce à ce dispositif, les entrepreneur.e.s bénéficient d’un prêt sans frais, sans intérêt et sans garantie. Ce prêt renforce l’apport personnel de l’entrepreneur.e et les fonds propres de l’entreprise et permet ainsi la concrétisation et le développement de leur projet. Depuis son lancement en 2020, 16 entrepreneur.e.s sociaux.ales ont bénéficié de ce financement alternatif, d’un montant allant de 15 000 à 25 000 dinars. Le prêt d’honneur s’inscrit dans une démarche solidaire puisque le remboursement du prêt permet de réalimenter le fonds et donc de financer d’autres entrepreneur.e.s ayant un impact sur l’environnement et la société.

Histoire d’un.e acteur.rice de changement

Fahd Hannachi et Asma Laajimi – Ligne 13

Fahd et Asma ont toujours eu la fibre entrepreneuriale. Ils ont tous les deux fait leurs études dans le management digital, et ont orienté leurs carrières dans la mode. Ensemble, ils ont fondé Ligne 13, une marque de sacs et d’accessoires composés à 100% de déchets industriels. Leur matière première signature, c’est le jean recyclé. Fahd s’occupe de l’aspect opérationnel, tandis qu’Asma gère le développement de l’entreprise.

Les débuts ont été difficiles, notamment pour la recherche des matières premières. Fahd explique qu’il « a contacté toutes les usines de textile en Tunisie pour les démarcher et ça n’a pas fonctionné ». Malgré cet échec, Fahd et Asma ont compris qu’il fallait aborder le problème via une autre approche et ont commencé à se rapprocher non pas de ceux qui produisent mais de « ceux qui trient ».

Leur aventure entrepreneuriale commence par un premier produit : le sac à dos. Ils ont autofinancé Ligne 13 pendant six mois avant de rejoindre l’incubateur du Lab’ess et d’obtenir une première subvention de

prototypage. « Cette subvention nous a changé la vie », en permettant de lancer la production d’une grande quantité de produits. Ils ont ensuite bénéficié du prêt d’honneur, une « assurance » qui leur permettait de voir plus grand, « sans penser aux risques ». « Nous remercions encore le Lab’ess, car ça nous a énormément boosté et nous a permis d’adopter une méthode de travail que nous utilisons toujours aujourd’hui »

Des difficultés, ils en ont eu, mais comme l’explique Fahd, « avoir une entreprise, c’est tous les jours des problèmes à résoudre ». Par Ligne 13, Asma et Fahd veulent aussi sensibiliser, « intégrer dans le quotidien des tunisiens que l’on peut récupérer des déchets » et « en ressortir quelque chose de positif ».

Aujourd’hui, Asma et Fahd voient les choses en grand pour l’avenir de Ligne 13 : continuer le travail de sensibilisation au sein de la société tunisienne, collaborer avec des grandes marques en Tunisie et développer un système d’exportation de leurs produits à l’international.

Hélène Delahaye et Stéphanie Pilata – La Pause Parentale

« Au début, quand on organisait les ateliers, on avait beaucoup de demandes. Et malgré l’organisation qu’on pensait juste, on avait très peu d’inscrits, voir personne ».

Les débuts d’Hélène et Stéphanie dans l’entrepreunariat étaient semé d’embûches, mais comme elles le disent si bien : « on n’a pas baissé les bras ». Leur aventure part d’une volonté : proposer des services d’accompagnement aux parents autour de périnatalité et de la grossesse jusqu’à l’âge de six ans. Pour elles, devenir parents n’est pas inné et elles ont trouvé nécessaire de bâtir un projet à impact pour aider les parents à mieux vivre leur parentalité, d’autant plus que ce type d’accompagnement n’existait pas en Tunisie. Cependant, comme l’explique Hélène, « on ne savait pas comment faire vivre notre projet, lui créer une identité et un business plan ».

C’est ainsi qu’au sein du Lab’ess, elles ont appris à devenir entrepreneures, elles qui viennent du milieu bancaire (Stéphanie) et de la pédiatrie (Hélène). Elles ont transformé leur idée en une activité génératrice de revenus, en se perfectionnant grâce à un accompagnement personnalisé et des sessions de formations collectives. Bénéficiaire du prêt d’honneur, cela leur a permis de structurer une véritable stratégie marketing.

Aujourd’hui, Hélène et Stéphanie rêvent de déployer leur projet dans l’ensemble du territoire tunisien, et espèrent fonder une Maison des Parents via un financement crowdfunding.

Sabri Cheriha – Wefix

Wefix.tn, c’est le projet de Sabri : une plateforme en ligne de réparation d’appareils électroménagers et de ventes d’appareils reconditionnés. Travaillant avant dans une entreprise de gestion de distributeurs automatiques à café, il a pu être témoin des importants déchets d’appareils. Inquiet de la situation environnementale et du manque de services dans le domaine de la réparation, Sabri a pour objectif avec Wefix de récupérer des appareils électroménagers et de leur donner une seconde vie, tout en incitant également les gens à les réparer. Il a débuté par une grande collecte de dons d’appareils inutilisés et c’est à partir de là qu’il a commencé ses premières réparations.

Malgré les difficultés, liées au manque de techniciens et de pièces détachées en Tunisie, Sabri a développé son entreprise, en créant son site internet et en se faisant connaitre sur les réseaux sociaux. Wefix est aujourd’hui composé de trois techniciens permanents et d’une dizaine de partenaires. « La reconnaissance des gens et l’enthousiasme vis-à-vis du projet, me motive et m’encourage à continuer. Parfois, tu répares un appareil et tu as l’impression d’avoir sauvé la vie des gens ! ».

Au Lab’ess, Sabri a découvert un écosystème d’entrepreneur.e.s, avec un « esprit de famille » qui l’a marqué. « L’équipe du Lab’ess m’a permis de bien façonner le projet et m’a aussi apporté de la crédibilité et de la visibilité. Le Lab’ess est un incubateur qui occupe une grande place dans l’écosystème des start-up, donc en faire partie permet de bénéficier d’un rayonnement professionnel plus important. C’était une très bonne expérience ».

Wefix participe également à des évènements de sensibilisation à l’écologie, en partenariat avec le Ministère de l’Environnement et a obtenu le label start-up en 2022.

Sabri souhaite désormais engager plus de techniciens, présents sur l’ensemble du territoire tunisien. En outre, il aspire à développer un nouveau type de réparation : celle des appareils électroniques, également une grande source de déchets en Tunisie.

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