Hosni Krid : «Pi2r, une des rares agences qui apprend son métier à ses clients»

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Interview avec Hosni Krid GARGOURI-Fondatrice et CEO de Pi2r.

Pi2r fête bientôt ses 20 ans sur le marché, un mot sur votre parcours ?

Un parcours atypique, pour une jeune AIESEC’er avec un diplôme de science de gestion option commerce extérieur de l’ESC de Tunis en poche. 2 ans après ma maîtrise, en 2003, je crée un centre de compétence dans les métiers du search (référencement naturel et payant) dédié au marché français.

En 2005, la structure est rachetée par le groupe Nextedia dont l’ambition à l’époque est de regrouper tous les métiers du digital sous une même marque afin d’accompagner les clients sur l’ensemble de leur stratégie digitale et profiter des différentes synergies qui existent entre les leviers.

Je suis restée Directrice Générale de la filiale tunisienne et j’ai eu l’occasion d’opérer avec mes équipes sur des projets tels que Cdiscount, LVMH, Easyjet et 600 autres projets. C’était une aventure extraordinaire avec une équipe de 300 personnes dont 80 en Tunisie.

En 2007, Lagardère Active rachète Nextedia et œuvre à la transformer en une agence de brand content, l’échec a été cuisant. En 2010, Lagardère décide de revendre Nextedia et c’est à ce moment-là où je reprends possession de la structure que j’avais créée près de 10 ans auparavant.

Ces 12 dernières années, Pi2r a vu des générations de talentueux collaborateurs qui ont contribué à son développement tant en Tunisie qu’à l’étranger. 

Je suis fière d’être une des rares femmes fondatrices d’agence marketing digitale depuis ces 20 dernières années, animée par beaucoup de passion et envie de rendre meilleur le quotidien des chefs d’entreprise face aux défis que nous imposent le «digital» avec des stratégies intelligentes et parfaitement adaptées à leurs besoins.

Vous adoptez une approche « Customer Centric », en quoi cela consiste-t-il et quels en sont les avantages pour les deux parties ?

Une approche «customer centric» par définition «est le fait d’avoir une organisation centrée sur le client, ceci revient au fait de prioriser les efforts qui éliminent les points de douleur de ses clients.» 

Au niveau de Pi2r, cela commence dès le 1er contact avec notre prospect, une écoute active pour comprendre d’abord ses motivations et ses objectifs. En effet, en matière de digital, souvent les associations, entre ce que demande le client et les objectifs qu’il souhaite atteindre ne sont pas compatibles, cela revient souvent au fait qu’il a été mal informé ou mal conseillé.

A ce stade, il nous est arrivé de refuser de collaborer avec des prospects car nous n’étions pas capables de les convaincre de l’échec de leur approche.

Ensuite, tout au long de la relation client, en plus d’argumenter chacune des actions mises en place par des chiffres, nous œuvrons à ce qu’un transfert de connaissances et de compétences soit fait au bénéfice du client.

Nous construisons un relationnel fort dont la réussite est le fameux mélange entre les expertises de nos clients et les nôtres pour atteindre des objectifs durables. 

Nous sommes peut-être une des rares agences qui apprend son métier à ses clients.

Et enfin, nos choix en matière de technologie, de prestation ou d’outils évoluent de manière à permettre à nos clients de prendre la main et de devenir autonome sur la mise en place de leur stratégie marketing et digitale.

Chez Pi2r nous avons la conviction que notre valeur ajoutée réside dans le fait d’aider les entreprises à vivre leur évolution digitale en toute harmonie.  

Comment et quand, peut-on qualifier une transformation digitale réussie ?

Tout d’abord je tiens à préciser que je n’aime pas l’expression «transformation digitale», je pense même que c’est à l’origine de tous les échecs qui touchent la majorité des entreprises qui s’embarquent dans cette expérience.

Etant moi-même chef d’entreprise, je n’aime pas m’embarquer dans des projets pour transformer mon entreprise mais plutôt pour la faire évoluer.

Un projet de transformation est un projet brusque, un projet d’évolution est un projet qui s’inscrit dans le temps particulièrement lorsqu’il s’agit de digital.  Les innovations technologiques continues engendrent un impact permanent sur les attentes des consommateurs et donc une adaptation sans fin de l’entreprise pour continuer à préserver ses clients et son marché.

Les enjeux de l’évolution digitale sont des enjeux principalement marketing donc c’est de ce côté-là qu’il faut aborder les choses, une fois c’est le cas, la réussite pour moi vient au moment où l’entreprise réussit à créer les bons canaux d’écoute, de créativité et d’agilité pour ses collaborateurs, fournisseurs et clients.

Je pourrai vous en parler des heures mais je vais m’arrêter là.

Selon vous, quelles sont les mesures que devrait adopter la Tunisie afin que les entreprises puissent assurer pleinement leur transformation digitale ?

Connaissances et compétences, ce sont, à mon avis, les deux axes dans lesquels doit investir la Tunisie.

Connaissances car il y a encore beaucoup de travail de sensibilisation et d’explication pour que les chefs d’entreprises comprennent et intègrent la bonne attitude et visualisent le chemin à prendre pour vivre leur évolution digitale. 

Notre tissu économique est composé majoritairement de PME où les patrons sont au cœur de toute leur activité business et avec des moyens limités, rajouter à leur quotidien, les challenges qu’amène le digital, croyez-moi, ils naviguent souvent dans le brouillard, il faut les aider à y voir plus clair avec des programmes de sensibilisation nationaux…

Compétences : monter en compétence sur les sujets du digital (marketing, RH, outils, techniques et méthodes) c’est l’œuvre d’une vie. Recruter les bonnes compétences pour réussir, c’est quasiment impossible : les seniors ont besoin de mettre à jour leurs connaissances et les plus jeunes manquent de maturité et de stratégie.

Les premiers coûtent chers et ne sont pas rentables et les jeunes plus accessibles mais sans expertise.

C’est beaucoup de temps et d’investissement pour les entreprises, pour très peu de retour.

Il faut à mon avis des programmes d’accompagnement et de coaching adaptés et efficaces qui s’inscrivent dans la durée…

J’aimerais aussi ajouter les lois et le cadre juridique. Qui est garant de l’éthique et de l’expertise ? Entre un expert qui induit en erreur et un salarié qui part après avoir à peine bénéficié d’une formation… Je ne parle même pas des programmes de formation qui fusent de partout, qui attestent de leur qualité ? Mais là encore, c’est un sujet épineux. Cela peut vous sembler naïf mais je crois que pour le «digital» il faut créer des lois drastiques pour protéger les chefs d’entreprise.

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