Tunisie – BCT : Une économie résiliente mais sous pression

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Dans son rapport annuel 2024, la Banque Centrale de Tunisie (BCT), par la voix de son gouverneur Fethi Zouhair Nouri, dresse le tableau de l’économie tunisienne qui a renoué avec une croissance modérée de 1,4% après une année de stagnation en 2023.

Cette performance est principalement soutenue par une excellente campagne agricole, favorisée par une amélioration des conditions climatiques, et par la vigueur du secteur des services, en particulier le tourisme. Ces facteurs ont compensé les difficultés du secteur industriel, affecté par le ralentissement de la zone euro, souligne la note.

La demande intérieure a été le principal moteur de cette croissance, tirée par la consommation privée et une reprise de l’investissement, malgré l’impact négatif de la demande extérieure due au ralentissement économique chez les principaux partenaires commerciaux.

Toutefois, ce rythme de croissance reste insuffisant pour résorber significativement le chômage, dont le taux n’a que marginalement reculé à 16% à fin septembre 2024, contre 16,4% fin 2023.

Le secteur extérieur a poursuivi son ajustement, avec une maîtrise du déficit courant ramené à 1,5% du PIB (-2 425 millions de dinars), contre -2,2% en 2023. Cette amélioration est le fruit de la solidité des recettes touristiques et des transferts des travailleurs tunisiens à l’étranger. En revanche, le déficit commercial s’est creusé d’environ 11%, reflétant une hausse des importations face à des exportations en stagnation, malgré la bonne tenue du secteur oléicole.

La stabilité des grands équilibres courants a permis de reconstituer les réserves en devises, qui s’établissent à 27,3 milliards de dinars fin 2024, couvrant 121 jours d’importation, un niveau quasi stable malgré l’alourdissement des remboursements de la dette extérieure à long terme. Le dinar a ainsi bénéficié d’une quasi-stabilité face aux principales devises.

Sur le plan budgétaire, le déficit hors privatisations et dons s’est contracté pour s’établir à 6% du PIB en 2024, contre 7,6% l’année précédente. Cette consolidation reflète une gestion plus rigoureuse des dépenses et une augmentation des recettes internes de l’État, soutenue par la reprise économique. La dette publique a, en conséquence, reculé de 3,4 points de pourcentage pour s’établir à 81,2% du PIB.

L’inflation a poursuivi sa décrue, s’établissant à 6,2% en glissement annuel fin 2024, contre 8,1% un an plus tôt, avec une moyenne annuelle de 7% contre 9,3% en 2023. Cette désinflation est attribuable à la baisse des prix internationaux des produits de base, à la stabilité du dinar et aux effets de la politique monétaire restrictive.

Face à la persistance de risques inflationnistes, la BCT) a maintenu une approche prudente, gardant son taux directeur à 8% tout au long de l’année 2024. Elle a parallèlement poursuivi la mise en œuvre de son deuxième plan stratégique (2023-2025), finalisant notamment son dispositif de management et d’innovation.

Dans le domaine des paiements, la BCT a engagé plusieurs actions stratégiques pour moderniser l’écosystème, visant à renforcer l’efficacité, la sécurité et l’accessibilité des services financiers. Le lancement de la plateforme « TuniChèque », à la suite de la promulgation de la loi n°2024-41 du 2 août 2024, constitue une avancée majeure dans la réforme du paiement par chèque.

La coopération internationale a été renforcée, avec la signature d’une convention technique avec la Banque Centrale d’Égypte et l’adhésion à un projet pilote de l’Union Européenne visant à renforcer la stabilité financière et la gouvernance en Afrique. La BCT a également participé activement à de nombreux événements régionaux et internationaux.

Pour 2025, les perspectives mondiales demeurent fragiles, assombries par l’accentuation des tensions géopolitiques et des politiques protectionnistes, notamment aux États-Unis, ce qui pèse sur la croissance globale et la confiance des investisseurs.

Malgré ce contexte, l’économie tunisienne, ayant développé une résilience certaine, devrait accélérer sa croissance en 2025, portée à nouveau par l’agriculture, les services et la reprise minière. La faiblesse persistante de la zone euro, principal partenaire commercial, reste néanmoins un risque pour les industries manufacturières exportatrices.

Sur le plan monétaire, bien que la BCT ait procédé à une baisse de 50 points de base de son taux directeur le 26 mars 2025, le ramenant à 7,5%, l’évolution future de l’inflation reste incertaine. Plusieurs risques haussiers persistent, liés aux prix internationaux, aux coûts salariaux, à la gestion des déséquilibres budgétaires et à la situation hydrique du pays.

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